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Le retour d’information ou feedback ciblé : comment faire ?

14 mai 2019
Le retour d’information ou feedback ciblé : comment faire ?

Feedback ciblé

Aujourd’hui, le retour d’information tel que défendu par les neurosciences cognitives est un pilier fondamental de l’apprentissage. Le cerveau fonctionnerait la plupart du temps en mode automatique. Il formule sans arrêt un jeu d’hypothèses hiérarchiques organisé en fonction de leur plausibilité. « Je prédisais A, il arrive A = plaisir, satisfaction : Ah, je n’étais pas sûr d’avoir raison mais maintenant, je le sais ! ». Ce feedback  participe au renforcement de la connexion neuronale lié à cet apprentissage. « Je prédisais A, il arrive B = aïe, douleur ! désappointement ! Je m’étais fait un modèle de cette situation, il n’est pas correct ! ». La connexion neuronale concernée doit être fracturée : c’est ce que réalise l’élagage synaptique. Le plus important disent les spécialistes, est de savoir d’où vient cette erreur, quelle en est la cause et comment la corriger.

Le feedback ciblé : qu’est-ce que c’est ?

C’est un retour d’information, à propos d’une tâche réalisée, d’une compétence menée dans une situation donnée, donc dans des conditions déterminées. Cette définition montre à quel point la compétence mobilise un ensemble de considérations complexes dont l’opérateur n’a souvent pas conscience, d’où la nécessité d’un regard extérieur.

Les caractéristiques d’un bon feedback sont bien déterminées. Il est considéré comme constructif s’il est « descriptif, non jugeant, spécifique, porte sur le comportement et non sur la personnalité, bénéfique pour celui qui le reçoit, vise à partager l’information plutôt que de donner un conseil, limité dans son contenu et adapté.[1]»

Réaliser un feedback constructif s’outille d’une technique

C’est la technique[2] qui permet son efficacité. Elle est conduite par un superviseur[3] qui vise le développement, l’autonomie et la réflexivité dans un but formatif. Ce feedback comprend 5 phases[4] :

  • 1° Invitation : Je te propose, si tu es d’accord, de prendre un temps, pour un retour sur ton action dans une visée compréhensive.
  • 2° Autoévaluation du récepteur : Peux-tu me dire, selon toi, ce qui a bien fonctionné, ce qui a été bien mené dans cette situation ? Qu’est ce qui te fait dire cela ? Vois-tu des éléments sur lesquels tu pourrais performer ? Qu’est-ce qui te fait dire ça ?…
  • 3° Feedback du donneur : Voici mes observations, j’ai apprécié la manière dont tu as …, à ce moment… Et si toutefois, la performance nécessitait un conseil, une recommandation, ne jamais dire « par contre, en revanche, néanmoins…». Ces connecteurs logiques d’opposition viendraient écraser le bénéfice du compliment. Car savez-vous que nous sommes très sensibles à la négativité ? Héritage lointain de notre évolution qui fait que nous percevons d’emblée notre environnement comme menaçant mais ce, dans un but protecteur. Dire plutôt : «…et pour gagner en sécurité ou en efficacité… pense à … ». C’est beaucoup plus tonique !
  • 4° Résolution : À propos de cette situation, quelles actions envisages-tu dès à présent ? Dans quels délais vois-tu cela possible ? Quels moyens seraient les plus pertinents, rapides, adaptés … ?
  • 5° Conclusion : Comment as-tu vécu ce moment de feedback ? Et, par rapport à notre échange, que retiens-tu ou qu’est-ce que tu gardes ?

Cette phase de méta-analyse est très intéressante. Elle invite l’opérateur à réaliser un résumé-synthèse sur l’ensemble du feedback, à énoncer avec ses propres mots, ce qu’il a bien mené et ses points de perfectionnement. Il est prêt maintenant pour transférer les apprentissages en situation nouvelle. De plus, il a gagné confiance car il a été entendu et respecté, à un moment donné.

Le double effet du feedback ciblé

Force est de constater qu’en situation de travail, dire : « c’était bien » ne sert à rien ! C’est trop facile, trop vague. Ça vaut un like, pas plus ! L’individu qui reçoit ce message ne sait pas précisément ce qui a été bien ! Est-il plus avancé ? Quelle connexion synaptique liée à cette performance est renforcée ?

Ce feedback est d’autant plus bénéfique qu’il est proche de l’action, centré sur la réalité du receveur, sur ses besoins spécifiques d’apprentissage : c’est alors un feedback proche ciblé[5].

Selon la loi du renforcement[6], non seulement le feedback positif ciblé conduit à reproduire les actions qui ont généré la récompense mais en plus, cette action prend de la valeur aux yeux de l’opérateur (Schultz[7]) : « Ah, je ne savais pas que c’était important de bien faire ça ! »

Le feedback ciblé : une habitude fonctionnelle collaborative

Plus ces petits moments sont effectifs, plus le donneur développera une conscience et une précision des compétences que nécessitent les tâches de ses collaborateurs et plus il développera des facilités « à dire » et « à bien dire». De même, l’interlocuteur, du fait de la rigueur et la bienveillance sous-tendue par la technique de ce feedback, acceptera davantage ce retour. Il n’est plus question de le vivre comme menaçant voire intrusif ; il est pour tous deux alors, « porteur de développement[8] ».

Il y a de la technique dans la relation professionnelle. Celle-ci comprend un ensemble de schèmes, d’organisateurs de l’activité[9] définis comme « ce qui prépare une action ou une suite d’actions pour qu’elles se déroulent dans les conditions les meilleures, les plus efficaces[10]. »

Le GRIEPS, vous accompagne dans ses formations à acquérir des techniques de communication, à distinguer faute, maladresse et erreur et à avoir une posture adaptée en regard.

Nous vous offrons des outils d’analyse et de compréhension des mécanismes d’apprentissage, des grilles d’analyse de la nature des erreurs pour ne pas tomber dans le piège des conceptions moralisatrices, dépréciatives mais viser plutôt à une conception émancipatrice du questionnement de son action. Rejoignez-nous et apprenons ensemble !

Technique du feedback ciblé

1° Invitation

2° Autoévaluation du récepteur

3° Feedback du donneur

4° Résolution

5° Conclusion


[1] MOOC « La supervision du raisonnement clinique en contexte de soins » Module 7, chapitre 4 : le feedback pour soutenir la réflexivité du stagiaire

[2] Technique au sens philosophique “(du grec technè) est un ensemble de procédés, de moyens, de méthodes, de savoir-faire permettant la fabrication d’un objet attendu et utile pour l’homme. Ces procédés sont transmis par un apprentissage fait d’imitations, d’essais, de tâtonnements (c’est en forgeant qu’on devient forgeron). https://philosophie.alain.over-blog.com/article-la-technique-69627325.html

[3]Kilminster S, Cottrell D, Grant J, Jolly B. Effective educational and clinical supervision. AMEE GUIDE 27. Dundee, UK: Association for Medical Education in Europe (AMEE), 2007, proposent la définition suivante : «  Processus de guidance et de rétroaction ou feedback privilégié pour faire progresser le supervisé dans ses apprentissages, dans le contexte de la prise en charge d’un patient par un professionnel de santé ».

[4] Technique adaptée du MOOC « La supervision du raisonnement clinique en contexte de soins » Université de Montréal, Université de Genève & Université libre de Bruxelles 2019

[5] Les méta analyses de J Hattie donne le classement des facteurs pour la réussite scolaire : Le retour sur information a une taille d’effet à 0.73 https://www.scoop.it/topic/la-pedagogie-de-l-enseignement-superieur-par-la-map-entpe/p/4059739880/2016/02/15/classement-de-hattie-liste-de-facteurs-pour-la-reussite-scolaire-visible-learning

[6] La loi de Hull, appelée encore loi de renforcement a été définie par le chercheur Clark Hull

[7]  Lacroix P., Medjad N., et al. Neurolearning, Eyrolles, 12 décembre 2016

[8] Terminologie employée par P. Mayen. Mayen P. Les situations professionnelles : un point de vue de didactique professionnelle, Phronesis La situation professionnelle, Volume 1, numéro 1, janvier 2012 https://www.erudit.org/fr/revues/phro/2012-v1-n1-phro1825121/1006484ar.pdf

[9] tels que définis en didactique professionnelle

[10] Vinnatier I.  Autour des mots « organisateurs de la pratique et/ou de l’activité enseignante », Recherche et Formation N°56  2007 p. 99

Auteur : Hélène BELOU

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